Allocution de M. Gaston TONG SANG, président de l’assemblée de la Polynésie française, à l’occasion de la première séance de la session budgétaire - 15-09-2022

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Mesdames et Messieurs,

Vous savez comme je tiens, à chaque fois que la réalité nous rappelle à notre modeste condition de mortels, à honorer la mémoire de celles et ceux qui un jour ont siéger sur ces bancs et nous ont précédés. Nous avons récemment perdu deux de nos anciens collègues. Il s’agit de Monsieur Mathias TARUOURA, originaire de Bora Bora, décédé le 23 juin dernier et qui fut conseiller territorial entre 1986 et 1991 ; et de Monsieur Guy RAUZY, ancien Maire de Hiva Oa, décédé le 26 juillet dernier et qui fut élu à l’assemblée entre 1967 et 1996. Ensemble, je propose que nous respections une minute de silence afin de leur rendre hommage et de leur témoigner notre reconnaissance pour leur engagement au service de notre pays.

— 1 minute de silence —

 

Monsieur le Secrétaire général du haut-commissariat de la République en Polynésie française,

Monsieur le Président de la Polynésie française,

Madame et Monsieur les Sénateurs,

Messieurs les Députés,

Monsieur le Vice-président,

Mesdames et Messieurs les ministres du gouvernement de la Polynésie française,

Monsieur le Maire de Papeete,

Mesdames et Monsieur les Présidents des groupes politiques représentés à l’assemblée,

Mesdames et Messieurs les représentants, mes chers collègues,

Monsieur le Conseiller économique, social et environnemental,

Monsieur le Président du Tribunal administratif,

Monsieur le Président de la Chambre territoriale des comptes,

Monsieur le Payeur général de la Polynésie française,

Monsieur le Directeur des finances publiques,

Madame la Directrice de cabinet du Président,

Madame le Secrétaire général de l’assemblée de la Polynésie française,

Mesdames et Messieurs les Chefs de service de l’assemblée,

 

Mesdames et Messieurs les maires et élus municipaux,

Madame le Maire de Nouméa, quel plaisir de vous accueillir ici !

Monsieur le Président de la Chambre de commerce,

Monsieur le Président de la Chambre de l'agriculture et de la pêche lagonaire.

Mesdames et Messieurs les représentants du monde patronal et des syndicats de salariés,

Messieurs les représentants des confessions religieuses,

Mesdames et Messieurs les journalistes,

Distingués invités, Chers internautes et téléspectateurs, Chers amis,

'Ia ora na i roto i te aroha ō tō tātou te Atua !

Voici qu’à nouveau nous sommes réunis afin d’ouvrir ensemble la cinquième et dernière session budgétaire de notre mandature. Alors que la tâche à accomplir reste immense, il nous faudra, dans quelques mois à peine, nous en remettre au verdict des urnes et à la sagesse de celles et ceux dont le choix déterminera la destinée de notre pays : les électeurs de Polynésie française.

Ce qui est attendu aujourd’hui, plus que le discours du président de notre honorable assemblée, c’est évidemment l’allocution du Président de la Polynésie française, Monsieur Edouard FRITCH, qui dressera le bilan d’étape de l’action du gouvernement pour l’année civile qui s’achèvera dans quelques semaines et qui nous annoncera ses orientations et ses perspectives pour les mois à venir.

Je serai volontairement bref afin de laisser rapidement à notre Président le soin de me succéder à cette tribune.

 

Le cycle législatif de 90 jours qui s’ouvre aujourd’hui revêtira un caractère très particulier. En effet, même si comme indiqué plus haut, il marquera la fin d’une mandature de cinq années qui aura bousculé les esprits et les hommes tant elle aura été surprenante et éprouvante, ce cycle marquera surtout le retour à une vie normale, sans restriction, sans obligations sanitaires, sans limitation de nos droits et de nos libertés.

Cette session budgétaire sera aussi celle de l’accélération de l’activité économique du Pays dont le redémarrage a été amorcé depuis plusieurs mois déjà grâce aux mesures courageuses et ambitieuses du gouvernement mises en place avec l’appui des cadres juridiques et des dispositions règlementaires adoptés par notre assemblée.

Cette dynamique reprise économique, nous la devons également à l’Etat, aux prêts concédés au Pays, aux prêts garantis par l’Etat et au Fonds de solidarité aux entreprises et indépendants qui ont bénéficié à de très nombreuses entreprises polynésiennes qui auraient été balayées sans ce coup de pouce républicain.

 

Afin de favoriser cette accélération et d’accompagner cette ascension confirmée — dois-je le rappeler — par l’ensemble des indicateurs économiques, nous devrons, au cours des semaines à venir, délibérer avec toujours plus d’efficacité et de vigueur, débattre avec toujours plus de pertinence et de réalisme et être force de proposition en usant sans réserve de notre droit d’amendement et d’initiative parlementaire.

Nul doute que nous devrons également, à l’occasion des débats budgétaires à venir, évoquer la situation préoccupante de notre système de protection sociale généralisée fortement sinistré par la crise sanitaire et ses graves conséquences économiques et sociales.

Notre PSG est la propriété de chaque Polynésienne et de chaque Polynésien. C’est un bien commun, un patrimoine collectif que nous devons sauvegarder, au prix d’importants sacrifices, impopulaires, décriés et mal compris car malheureusement instrumentalisés par les forces politiques d’opposition qui en font des arguments de taille dans les discours démagogiques qui se multiplient et se renforcent à l'occasion de campagnes électorales parfois déconcertantes.

Sur cette question, Monsieur le Secrétaire général du haut-commissariat, comme le Président du Pays a déjà eu l’occasion de le dire, nous comptons grandement sur la solidarité nationale qui permettra d’envisager plus sereinement la pérennité de nos comptes sociaux.

Tout comme il l’a été au cours des périodes sombres et difficiles dont nous nous échappons à peine, j’ai la certitude que l’État sera à nouveau à nos côtés et au rendez-vous de l’égalité et de la fraternité. Si certains esprits chagrins réduisent de manière éhontée cet accompagnement bienveillant à de la mendicité, je considère pour ma part qu’appartenir de manière autonome à la République et épouser ses valeurs, c’est pouvoir compter sur son aide et trouver en elle l’assurance d’un soutien digne et solidaire.

Plus que jamais, alors que les balles sifflent aux oreilles de l’Europe et que les tensions qui agitent l’axe indopacifique se multiplient et se montrent de plus en plus menaçantes, nous avons besoin de la France et nous devons nous ranger, sans sentiment d’infériorité et avec beaucoup de fierté, aux côtés de la République française, et quand la réalité nous l’impose, derrière elle et derrière sa force protectrice.

Comme l’a annoncé le Président FRITCH à l’occasion du Congrès des Communes qui s’achève aujourd’hui à Paea, la session budgétaire qui débute sera aussi l’occasion de débattre et de délibérer sur la question du partage des compétences entre le Pays et les communes.Je voudrais ici assurer à mes collègues Maires qui ne siègent pas au sein de cet hémicycle qu’ils bénéficieront d’une écoute particulièrement attentive et bienveillante de la part de leurs collègues représentants, et que sur ce sujet, comme sur de nombreux autres, cette assemblée sera la leur et que leur voix et leurs préoccupations y seront entendues.

Tout comme le Président du Pays, qui a toujours conduit sa politique en étroite et sincère collaboration avec les Maires de Polynésie française, au-delà de leur appartenance politique, notre assemblée doit être elle aussi l'alliée et le partenaire infaillible des élus municipaux.

Mes chers collègues, puisque l’occasion m’est donnée ce matin de m’exprimer solennellement face à vous depuis cette tribune, j’aimerais au crépuscule d’une mandature particulièrement riche et agitée, partager avec vous mes satisfactions et mes regrets.

Ma principale satisfaction aura été — et je le dis en toute humilité et modestie — d’avoir tout mis en œuvre, au cours des quatre années qui viennent de s’écouler afin de pacifier nos débats et d’apaiser les esprits et les hommes. Vous savez sans doute mieux que moi comme nos discussions ont pu être véhémentes et virulentes au cours des mandatures passées. Je me réjouis, qu’hormis quelques rares dérapages, nous ayons su ensemble faire de cet hémicycle un lieu d’échanges courtois et respectueux.

Je me réjouis également d’avoir, avec vous, réussi la prouesse de faire de notre institution une assemblée résolument animée par un esprit d’ouverture.

 

  • Ouverture sur le changement avec la refonte du statut de nos collaborateurs ou les récentes modifications de notre règlement intérieur favorisant l’efficience et l’accélération de nos procédures législatives, la valorisation du rôle de nos présidents de groupe ou encore l’optimisation des moyens alloués aux groupes représentés à l’assemblée.

 

  • Ouverture sur l’opposition avec, dès le début de la mandature, sous l’impulsion du Président Edouard FRITCH, l’octroi de deux commissions aux groupes d’opposition, mais également la constitution de groupes de travail transpartisans pour accompagner la mise en place des réformes institutionnels, ou la formation systématique de délégations composées d’élus de l’ensemble des courants politiques représentés à l’assemblée lors des missions interparlementaires.

 

  • Ouverture sur le Pacifique avec la signature ou la reconduction de conventions de partenariat avec le Vanuatu, la Nouvelle Zélande, la Nouvelle Calédonie, Wallis et Futuna.

 

  • Ouverture sur le Pacifique élargi et l’Océanie avec la création du Groupe des Parlements des îles du Pacifique dont la prochaine réunion technique se réunira ici même au début du mois prochain.
  • Ouverture sur notre Parlement national avec la reconduction des conventions de partenariat nous liant au Sénat et à l’Assemblée nationale.

 

  • Ouverture sur le Monde avec notre adhésion à l’Assemblée parlementaire de la Francophonie, dont nous sommes désormais vice-président depuis le mois de juillet dernier et dont nous accueillerons, au mois de janvier prochain, le bureau pour sa réunion annuelle.

 

  • Ouverture sur la jeunesse avec la réactivation du dispositif « Jeunes cadres Polynésiens – Te U’i Hou no Ananahi » initiée par Edouard FRITCH, qui a permis récemment la formation, six mois durant, de 4 jeunes de niveau bac +3, au sein de nos commissions et des services administratifs de l’assemblée, rémunérés sur les crédits du cabinet du président de l’assemblée.

 

  • Et enfin, ouverture sur les préoccupations de nos citoyens avec la création de plusieurs missions d’information portant sur des sujets d’actualité et impliquant des consultations citoyennes et de la société civile.

 

L’une de mes grandes satisfactions a également été de travailler aux côtés de fonctionnaires impliqués, consciencieux et de grande qualité, sous l’autorité d’une secrétaire générale dévouée et de chefs de service au professionnalisme sans faille. Je tiens ici à saluer le travail réalisé et à leur adresser mes remerciements les plus sincères.

Mes regrets, eux, sont d’ordre politique, mes chers collègues. Après plus de trente années passées sur les bancs de cette assemblée, de loyauté à l’égard de mes électeurs, et de fidélité à mes convictions, je regrette profondément la légèreté avec laquelle certains d’entre nous traitent la sacralité du mandat que nous ont confié les électeurs.

Je ne suis pas de ceux qui culpabilisent l’électorat ou dénie l’évidence démocratique. Au contraire, je considère que le peuple a toujours raison, qu’il doit être écouté et que la vie politique demande une remise en question permanente. J’ai été moi-même candidat à de nombreuses élections au cours de ma vie publique. Heureux gagnant de temps à autre, malheureux perdant parfois, j’ai toujours eu à cœur de respecter le choix des électeurs et d’honorer leur confiance.

Nous avons vu, au cours des années passées, que la crise la plus scélérate, la plus accablante, la plus dommageable pour l’équilibre de notre pays, n’a pas été de nature économique, sociale ou sanitaire. Elle a été politique et porte un nom qui résonne encore tristement dans les couloirs de cette institution : l’instabilité !

Mon vœu le plus cher pour notre institution et pour notre pays est que nous n’ayons pas à revivre les tourments de l’irresponsabilité politique.

J’ai foi en nos électeurs et regrette profondément que leurs suffrages se retrouvent tristement piétinés et souillés par le nomadisme politique pré-électoral, par les alliances secrètes et improbables, les transfuges contre nature, les consignes de vote déconcertantes, la fragilité ou l’immaturité des convictions.

La démocratie vaut bien mieux que tout cela. Sa force et sa pureté doivent éclairer nos décisions et nous contraindre à plus de constance et de maturité dans nos choix politiques et idéologiques. Le peuple nous a confié un mandat, c’est lui seul qui nous jugera !

Monsieur le Président, mon cher Edouard, les départs récents ou plus anciens de ceux qui furent nos compagnons de route et qui restent malgré tout nos frères et nos sœurs, ne doivent pas vous faire douter de la loyauté, de la fidélité et de la confiance que vous portent encore vos compagnons de la majorité unis en rang serré autour de vous, de votre gouvernement, et qui porteront avec vous le budget de la collectivité pour l’année à venir.

Votre majorité demeure vaillante et pleinement consciente de l’impérieuse nécessité de vous accompagner dans la reconstruction déjà bien engagée de l’économie polynésienne.

Monsieur le Président, tous les chiffres le démontrent et le prouvent : aucun gouvernement n’aura autant accompli par le passé que celui que vous dirigez, en dépit des nombreuses contraintes et des innombrables épreuves qui se sont imposées à nous au cours des trois dernières années. Sans votre réactivité et votre courage politique, notre Pays se serait enfoncé dans une crise sombre et abyssale accentuée par une inflation mondiale qui asphyxie nos économies insulaires.

Quoi que l’on puisse dire, quoi que l’on puisse vous reprocher, quelles qu’aient pu être les erreurs commises par chacun d’entre nous, vous avez été et vous demeurez l’homme de la situation, un dirigeant à la hauteur des défis qui s’imposent à notre pays et à notre peuple.  

Il nous faut terminer ensemble ce que nous avons commencé et continuer ensemble, toujours, avec chaque Polynésien, à construire un destin sans clivage, sans exclusion, sans division ; une Polynésie unie, autonome, ambitieuse, solidaire et ouverte sur le monde.

Je déclare solennellement la cinquième session budgétaire de notre assemblée ouverte et nous souhaite de riches et fructueux débats.

Māuruuru i te fāro'ora'a mai 'e 'Ia ora na i roto i te aroha o tō tātou Atua.